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Promenade touristique à Cotonou / Le grand mur des contemplations

par AEROMAG

Après la statue de l’Amazone, le Mur graffé de Cotonou, un joyau artistique niché au cœur de la capitale béninoise, est devenu la deuxième plus grande attraction touristique de la ville. Le mur du Port de Cotonou est graffé, taggué, peint et colorié sur plus d’un kilomètre, par une trentaine d’artistes plasticiens du Bénin et d’ailleurs.

Tout commence en 2013 à Fidjrossè. Ce quartier situé en bordure de merattirait littéralement artistes et jeunes expatriés en mission au Bénin. Sa plage, ses bistrots, ses filles de toutes origines, ses lieux culturels et l’ambiance festive qui y régnait ; tout cela constituait le moteur des rencontres humaines, source d’une créativité bouillonnante.  C’est dans ce melting-pot de passions artistiques, que quelques jeunes artistes plasticiens et graffeurs, à la recherche de terrain d’expression, et rassemblés au sein de l’association ELOWA, ontla lumineuse idée de lancer à Cotonou, le premier festival dénommé REGRAFF (Rencontres internationales graffiti). Quelques noms commençaient déjà à émerger comme Seencelor La Bombe, Sitou Matt, RafiyOkefolahan, Dr Mario, Arthur 2400,Guillaume Cardet ou encore LaurensonDjihouessi alias Stone. La même année, ce dernier fonde avec quelques-uns cités plus haut l’Association SenaStreet Art (ASSART) qui produit le festival Effet Graff.

Après plusieurs éditionsmoins médiatisées, plutôt tournées vers l’intérieur du pays et axées sur les thématiques du patrimoine, des racines et de l’identité, le festival Effet Graph obtient une autorisation officielle du gouvernement pour sa 7ème édition en 2021.

Un brin d’historique

Cette année-là, LaurensonDjihouessi et les siens rêvent grand ! Ils veulent offrir à Cotonou le plus long mur graphé en Afrique. Et le pari est tenu. Le rêve est matérialisé sur le mur des cheminots de l’ex-OCBN, sur une distance de plus de 600 mètres, avec des fresques aux milles couleurs réalisées par des artistes de différents pays. L’endroit est baptisé « le mur du patrimoine ».

Le succès du « mur du patrimoine »attire l’attention de la Fondation Claudine Talon. Celle-ci salue l’initiative, mais elle targue d’une vision plus audacieuse et plus ambitieuse. En collaboration avec le ministère en charge de la culture, elle soutient matériellement et financièrement l’ASSART dans son nouveau challenge, celui de créer sur lemur d’enceinte du port de Cotonou,la fresque murale la plus longue et la plus grande du monde. La huitième édition d’Effet Grafftrouvait ainsi son site et son thème : « The new Benin, mur du port ».

La commande de la Fondation Claudine Talon tombe comme du pain béni ; elle dope le moral de la trentaine d’artistes venus d’une quinzaine de pays (Bénin, Sénégal, Ghana, Brésil, Allemagne,France, Togo, Martinique, Algérie, Mexique, Argentine, Espagne, Maroc, Pérou, etc.). Et pour LaurensonDjihouessi, « c’est un projet fou, un projet démentiel, (…) une euphorie qui se matérialise ».  Du 11 avril au 12 mai 2022 s’est déroulée la première phase avec une bonne trentaine d’artistes (Seencelor La Bombe, Lionel Attéré,LaurensonDjihouessi,Tipam, Docteur Mario, FatiouAkindé, Houngnibo, Julien Sinzogan, Dominique Zinkpè, Sitou Matt, Madzo, Paola Delphine, Kalouf, Abyss, Becker One, etc.) qui ont livré leurs profondes inspirations sur ce mur vaste et long.

Pousser le rêve plus loin

Jets de peinture ou éclaboussures de couleurs, dessins aux contours réguliers ou géantes caricatures, personnages atypiques et paysages aux couleurs de la terre, en mode graffitis, styles figuratifs ou abstraits, toutes les techniques ont été utilisées. Et les œuvres, dans une continuité voulue comme dans un parcours touristique, racontent le « Bénin d’hier, d’aujourd’hui et de demain » ; ceci à travers le vécu quotidien des populations de toutes les contrées du pays, la culture, les traditions, les ambitions de développement ; mais aussi les scènes de vie quotidienne, la faune et la flore, les richesses agricoles, le retour des cerveaux, etc.

Quand par exemple les masques guèlèdè, surgis des doigts de Lionel Attéré, évoquent « cette société secrète qui protège ses membres de la sorcellerie », les joueurs de gangan (tambour parlant) d’Ayi Typam rappellent, par ce rythme exécuté pour les « Egungun » (revenants) que « les morts nesont pas morts » en pays Yoruba.

Et quoi de plus sacréque la fresque d’Eduardo Kobra du Brésil ! Son œuvre montre, dans une espèce de farandole spirituelle, des dignitaires d’une douzaine de religions différentes du monde, dans une communion totale, autour de la carte du Bénin couverte par le drapeau national. Symbole de dialogue interreligieux, detolérance, de cohabitation pacifiqueet du grand esprit œcuméniste qui caractérisent le Bénin, cette fresque est le point d’orgue de la deuxième phase de cette huitième édition du festival Effet Graff, consacrée au mur du port de Cotonou.

Livré en toute splendeur, à proximité de la place de l’Amazone sur le Boulevard de la Marina, « le mur des contemplations » du port de Cotonouest désormais la promenade incontournable pour tout visiteur ou touriste dans la ville. Il redore ainsi le blason des graffeurs et artistes visuels urbains, autrefois pourchassés et interpellés par la police pour vandalisme. Avec cette belle reconnaissance, le street-art prend désormais une place royale au cœur de la cité.

Sergent Markus T. DJAHO

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